mardi 13 mai 2008

Question d'humanité, sans doute (Guyane)




La première est une espèce marine des plus remarquables. Seule survivante d'une caste dont tous les représentants ont disparu depuis l'ère tertiaire. Excellente plongeuse, elle peut descendre jusqu'à 1300 mètres, ce pendant près de 80 minutes. Elle promène son double mètre et sa demi-tonne dans la plupart des océans du globe, sa carapace faite de petits osselets sur le dos, avec pour seul objectif d'obéir à ses cycles de reproduction. Elle débarque ainsi tous les ans sur les côtes de Guyane, notamment. Et l'on se presse sur les plages de Montjoly ou d'Awala-Yalimapo pour observer ce phénomène sans âge. Mais toutes n'atteignent pas les rivages, en proie au braconnage, aux filets de pêche, à la pollution ou à l'urbanisation des littoraux. Par conséquent certaines, comme celle qu'il est possible d'observer ci-dessus, échouent parfois sans vie sur le sable. Ce qui ne manque pas de déclencher une vague d'indignation parmi les innombrables associations qui luttent pour la survie de cette espèce en voie de disparition, et qui fait l'objet de programmes internationaux de protection et de conservation.

La seconde espèce nous est nettement moins inconnue. Rien de plus normal, il s'agit de la nôtre. L'Homo sapiens. Malheureusement sous une forme quelque peu dégénérescente, car parasitée ou plutôt infectée par des substances qu'elle a elle-même créées. La catégorie représentée ci-dessus peut être observée dans les rues de la plupart des cités de la planète. Dans toutes, en vérité. La Guyane n'est évidemment pas une exception. Sa localisation sud-américaine, ses frontières spongieuses font de ce département français un espace de circulation idéal pour les trafiquants en tout genre. Et la drogue la moins coûteuse, et donc la plus prisée par les exclus, a pour nom le crack. Inutile de s'étendre sur les ravages engendrés par le petit cristal. En revanche, il est étrange de constater avec quelle indifférence l'on observe la déchéance progressive de ses propres congénères. En s'indignant deux fois l'an, sans apporter de solution. Ou si peu.

Etrange comparaison, en réalité. Si ce n'est par sa simplicité. Le terme simpliste, ou simplificateur, survient sans doute déjà en parcourant ces lignes. Pourtant, c'est un fait, à la lecture du nombre d'organismes en charge de sauver ici la première espèce (à tout le moins de s'en soucier), et de leur équivalent afin de porter secours à la seconde, je ne puis que m'interroger davantage.
Et lorsque, comme sur les photos présentées ici, deux corps gisent en public, je vous laisse deviner lequel suscite le plus de réactions compatissantes. Peut-être une simple question humanitaire ? En fait, les autorités étatiques locales trouvent une solution aux moments opportuns. Comme, pour exemple, lors de la récente venue du p-résident des f-rançais. Ce jour, dans les rues de Cayenne, plus un seul SDF, plus l'ombre d'un cracké à la recherche de trois euros pour l'achat d'un caillou spatial. Non. Une rafle d'un nouveau genre les avait notamment envoyés dans les locaux de l'antenne psychiatrique de l'hôpital. Rassurez-vous, dès le lendemain matin, ils étaient de retour dans les rues. Retour à la normale, en somme. Et puis, reconnaissons que la révolte ne gronde pas vraiment... Juste un petit tour sur la Terre.

3 commentaires:

Bourbon a dit…

Belle chronique. Et applicable un peu partout...

Sebas a dit…

Après le Grenelle de l'environnement, il faut organiser le Grenelle de la misère...

La Goutte a dit…

Saisissant ce parallèle. Ah, les grosses tortues shootées au crack, ça fait vraiment flipper, mais que font nos gouvernants? Où est Borloo??? Et puis ce regard assassin, ça fait froid dans le dos.